Heures de réveil : 00h97, 2h03, 5h52.

Dans le laps de temps entre 2h03 et mon semi-recouchage entre 4h23 et 5h52, j’avais écrit environ 500 mots, sauf que mon navigateur a planté et ce connard de WordPress n’a rien enregistré. Oui, il le fait, normalement, et j’ai bien le seum donc on va refaire l’intro et tout refaire mais en moins sympa. En plus j’ai très mal au pied et il va flotter ou il flotte, je sais pas, mais mon corps, lui, SAIT. Le seul réconfort que j’ai actuellement est un bon café bien chaud pour entretenir mes problèmes gastriques.

Dans le billet précédent, j’ai fait un parallèle foireux entre le capitalisme et un-e partenaire violent-e. En vrai, c’est pas si foireux que ça, donc je voudrais voir si les conseils adaptés aux personnes victimes de violences conjugales le seraient pour des personnes victimes du système.

Je pourrais te dire je te jure, l’intro d’avant, pouah, elle arrachait tout, mais en fait non, pas du tout.

Let’s go.

🦃🦃🦃

Le Ministère du Féminicide poste sur son site :

🐦 Que les faits soient anciens ou récents, IL FAUT EN PARLER à une personne en qui vous avez confiance, à une professionnelle ou un professionnel (médecin, assistante sociale, assistant social, avocate, avocat…) ou à une association spécialisée dans la lutte contre le viol et les violences faites aux femmes qui vous accompagnera. Le 3919 est à votre disposition pour vous écouter et vous guider.

SIGNALEZ ces faits à la police ou à la gendarmerie. Vous ferez l’objet d’une attention particulière de la part des services de police ou des unités de gendarmerie qui ont mis en place des dispositifs d’accueil et d’aide aux victimes : intervenantes sociales, psychologues, permanence d’association d’aide aux victimes…

En cas d’urgence, appelez le 17 ou le 112 (depuis un portable).
(https://arretonslesviolences.gouv.fr/besoin-d-aide/violences-au-sein-du-couple)

Là, c’est le moment où on se dit wow, much information et où je ressors le meme généré à cette occasion par le moi du passé :

Quel talent.

En vrai, il y a des conseils légaux sur la page, ça peut être utile si jamais les flics acceptent de prendre ta main courante du bout des doigts (et sinon, on peut écrire directement au ou à la Procureur-e de son bled, iels sont sensé-es lire tout le courrier, il y aura ptet un créneau dans 3 ans).

La documentation sur les mesures de protection en PDF sont ici.

Puis après, j’ai été chercher ce qu’Internet me recommandait comme conseils d’aidant-e mais j’ai pas forcément trouvé ce que je voulais alors on va la faire à ma manière.

🦋 1 – Libérer la parole

Je sais que parler d’ouverture et de bienveillance lorsqu’on retranscrit ce conseil à l’anticapitalisme peut sembler ridicule, MAIS. Un des aspects les plus relevés selon mon baromètre et mon radar à cons, c’est l’absence de dialogue et le mépris de la gauche envers ces gens calmes et toujours si respectueux que sont les droitards que je suis pas sensée appeler droitards. C’est difficile à appliquer car ceux qui causent le plus sont souvent ceux qui ont un complexe de domination inassouvi et veulent t’en mettre plein la vue, jeune fille.

Bon alors déjà la jeune fille elle t’emmerde et elle est bien emmerdée parce que sa réaction primale est la fuite. L’affrontement si elle le sent et elle se fait trop vieille pour ces conneries, arrête de parler de toi à la troisième personne, c’est gênant.

D’accord, parfois je suis sidérée devant tant de connerie.

Mais faut bien leur expliquer, et ça…ben ça demande que ces gens sortent le nez de leur dystopie deux secondes et envisagent que peut-être, peut-être, la punk à chats a des trucs à leur dire. Du boulot. Pour ça, j’ai une astuce.

🦋 2 – Se souvenir des mauvais moments

Ça semble super méchant dans le contexte des violences conjugales, mais c’est utile lorsque la victime est rehappée par son agresseur. Nous, on oublie pas. On sait dire les dates, les événements, et un reality check de temps en temps, ça fait pas de mal (pour le gaslighting). Je sais de première main qu’on a tendance à dissimuler et oublier les épisodes violents, et je pense que c’est une erreur. C’est justement de se souvenir de ce qui précède la lune de miel (phase 1 du cycle de la violence) qui permet de ne pas retomber dans le panneau.

“Tu te souviens, quand tu as été harcelée et mise au placard à cause de ton handicap sans savoir que tes collègues étaient aussi harcelé-es ? Et quand tu a découvert bien trop tard que tout le monde aurait juste pu se faire confiance et se parler pour faire tomber le boss ?” me sert de temps en temps quand me vient l’idée de reprendre mon ancien job.

Des injustices, tout le monde en a vécues. Tu peux être sûr-e que la personne à qui tu parles a déjà été endommagée par le système. Peut-être (souvent) au travail, peut-être financièrement (pourquoi les banques se font autant de thunes sur nos comptes, d’abord ?), à moins que ça soit plus profond et que cette personne se retrouve dans une démarche revancharde du quandonveuonpeu I’ll be back genre j’ai été oppressé, j’oppresse à mon tour. Euxlles, je les regarde même plus, sans doute à tort, mais la trahison de classe, j’ai du mal. Je sais pas comment on dit avec le mot transfuge, je suis arrivée à transfumigation de classe mais je savais que je faisais fausse route.

Et pourtant.

🦋 3 – Faire preuve de patience

En voilà, un conseil que je ne suis pas et que je devrais. C’est pour ça que je suis pas instit. J’imploserais en deux jours. Je corrige les fautes sur les dessins d’enfant, stp, me dis pas que c’est ce qu’on attend d’une instit de maternelle.

Et pourtant.

C’est bien, la patience, je pense que les gens patients ont une sorte de superpouvoir, celui de pouvoir élaborer une stratégie. Le silence, je sais gérer, on rigole pas, dans le fond, je vous entends vous marrer parce que je suis un moulin à parole. Quand c’est important, je ne vends pas la mèche et c’est pas mal. Mais la patience, je sais pas faire.

On va donc imaginer que je suis quelqu’un d’autre.
Voilà.
Nous disions la patience, c’est bien, et je suis très patiente, j’aime attendre des jours et des semaines sans que rien ne se passe, trop de fun dans ma vie, je sais. Mais je sais attendre le bon moment pour parler aux personnes sensibles à ma propagande gauchiste et ça, c’est précieux. Je sais intervenir quand il le faut pour leur délivrer mon subtil message de collectivisation des moyens de production. Alors au début, on me prend pour une conne, ensuite on écoutera. Sans certitude.

Mais dans tous les cas…

🦋 4 – Raboule les Faits et la Documentation !

Il me manque un alter ego patient, en fait. La vie est mal foutue.

J’ai testé “Les Faits c’est Sciontifique” récemment, en imprimant de la documentation made in Gouvernement et ONU qui parlait de racisme systémique, pour dire “ah, pourtant, c’est reconnu par ceci cela checkmate, droitard”. Je ne pense pas avoir touché mon objectif, mais je m’en branle, je suis pas patiente mais opportuniste.

Si ton interlocuteur refuse de lire les Faits Sciontifiques et te demande de repréciser tel ou tel détail, il est en train de t’entourlouper par un effet de déplacement des buts, le truc où on te fait perdre ton temps à réclamer mille preuves de plus sans jamais en apporter soi-même. Je suis pas patiente alors à part laisser tomber en les insultant, je n’ai pas de recette, faudra demander ailleurs.

Si il y a réceptivité, et je mesure le taux de réceptivité au délai entre “Bonjour” et “J’ai quelque chose sur le feu qui sonne à la porte”, on peut instiller notre ignoble venin dans leurs esprits fermés.

Le souci, c’est que les Faits, c’est devenu vraiment douteux. Je doute pas souvent des chiffres de l’INSEE mais je doute de la manière dont ils sont rapportés. Comme avec un client relou, la formulation est importante pour ne pas les faire partir en vrille. C’est délicatesse, et la délicatesse c’est pas mon métier donc je balance de la doc en espérant que des gens me lisent et aillent voir.

Puis, si ça se trouve, dans 10 ans quand on aura tout cramé, ces gens réaliseront que la Main Invisible du Marché n’était qu’un leurre.

🦋 5 – La communauté est sympa, tu verras !

Un truc utile quand on commence à apprendre des trucs et des machins, c’est de pouvoir le faire avec d’autres personnes. Or, arriver à sec sur Facebook ou Twitter avec mille questions ne mène qu’à une chose : se faire insulter et prendre de haut. C’est là où tu es utile, car tu as toi aussi été insulté-e dans les commentaires, tu connais les astuces et les cheatcodes du milieu militant, c’est le moment de partager, d’ouvrir les portes et autres métaphores sur la découverte enjaillante d’un nouveau monde.

Avoir un-e pote dans la communauté, c’est super utile. Sois ce-tte pote. Présente-lui des gens, de préférence pas des gens qui insultent les autres en commentaires, stp. Intègre lae à des groupes et réponds à ses questions si nécessaire.

C’est beaucoup plus rassurant de changer de bord politique lorsqu’on est accompagné-e. Par contre, faut quand même prévenir : oui, on a pas de meilleurs comportements parce qu’on est de gauche, oui, il y a aussi des Jean-Nuisibles dans nos rangs, si tu savais…

🦋 6 – Protéger les vieux dossiers

Ressortir les “avant t’étais de droite haha” ou les “tu te souviens de ta tirade sur la laïcité en novembre 2012 ?” n’est pas une bonne idée. C’est humiliant et c’est humiliant. Non. Maintenant que ton droitard ou ta droitarde se radicalise on va pas saborder tous ses efforts.

Oui, même dans la période fatidique de la pureté militante, celle où tu as enfin lu des bouquins et que tu te la joues garant-e de la Foi alors que je t’ai tout appris. Vole, petit oiseau, vole et va te faire trépaner dans les commentaires du Point, ça te fera les pieds. Ouais, faut bien apprendre, on est toustes passé-es par là, à vouloir essayer nos nouveaux jouets.

C’est ingrat, mais nécessaire : on garde pour nous les vieux dossiers et on regarde l’œil humide notre bienfaisance à l’œuvre.

 

🦋 7 – Rester à l’écoute en cas de rechute

Ouais. On est dans une partie moins sympa, celle où la victime retourne à son agresseur. Alors, déjà, ce n’est pas vraiment de sa faute : des années de flexage ne se règlent pas en un jour. Je sais que c’est rageant, que t’as envie de lae secouer en hurlant “MAIS BON SANG T’AS QUOI DANS LA TÊTE ??!” mais faut faire preuve de patience. Encore.

Je sais pas, je sais pas pourquoi on galère à ce point alors qu’il est si facile de tomber dedans. Enfin si, je sais. L’hégémonie culturelle, la glorification de la réussite financière et des idoles milliardaires, la peur de faire le mauvais choix et de se casser la gueule. En vrai, on sait pas trop ce qu’on ferait si on gagnait la partie demain matin. La société n’est pas prête à plein de choses. On a pas les infrastructures pour certains projets et les habitudes ont l’avantage d’offrir une souffrance connue et donc paradoxalement rassurante.

Mais je sais un truc. Une fois que tu as senti le vent frais de la liberté sur ton visage, tu ne peux plus revenir en arrière. Une fois que l’espoir est né, c’est difficile de l’anéantir, il n’y a rien de plus intangible et mal défini qu’un espoir. On PEUT et on SAIT faire mieux. On est encore loin du but mais lorsqu’on milite, on ne milite pas juste pour soi. C’est probable qu’on ne voit jamais le fruit de nos heures de colles et ça rend le combat vachement plus majestueux. Dans tous les cas, quand on aura 85 piges, on dira aux jeunes que c’est grâce à nous, tout ça, alors autant que le grâce à nous ait un peu de gueule, tu ne crois pas ? Moi je veux pas laisser un grâce à nous tout pété aux autres.

Donc, ouais. Les habitudes. Les réflexes. Ose me dire que ta déconstruction ne t’a pas fait mal et que tu ne t’es jamais dit “merde, j’aurais dû rester dans mon ignorance”. Quand tu lèves le voile sur toutes les saloperies du monde, ta vie ne s’améliore pas, au contraire. Perso, j’ai déprimé vraiment très longtemps et je déprime encore devant notre échec collectif.

🦋 – Envoie les memes !!!

Ouais, ok. Après je vais faire autre chose de ma vie si tu veux bien.