Heure de réveil : 5h12

“Les Raisons de la Fatigue”. C’est un billet perso, ne le lis pas si tu t’en fous, je m’en fous aussi.
Y’a des trucs comme ça, ça te vide, et quand tout arrive en même temps, pouf. L’année a été difficile, la fin d’année m’a achevée.

Oui, ma belle-mère c’était de trop. Je ne pense pas qu’elle veuille me nuire consciemment mais elle m’est toxique, je m’en éloigne et elle m’en veut de pas embrasser toute sa toxicité inconsciente.
Elle est psychanalyste aussi. Lacanienne. Je ne doute pas qu’elle considère tout ça comme de la bienveillance, car elle SACHE et veut nous en informer au forceps, elle fait ça pour notre bien et ça doit être difficile de son point de vue de nous voir vivre totalement à rebrousse-poil.

J’ai détourné (kidnappé) son enfant de ses tentatives de normalisation, je comprends que ça puisse être dur à encaisser.
Sincèrement, je pense qu’elle en souffre et j’ai de la compassion pour elle. J’ai même de l’affection pour elle, mais heu…loin.

Mais moi, face à une personne toxique, maintenant, je me barre. Je peux pas sauver tout le monde, encore moins sauver une personne qui cherche elle-même à me sauver, vus nos deux caractères ça risquait pas de fonctionner.

🦎🦎🦎

Ouais, chuis une grosse fragile qui passe sa vie à fuir. Deal with it. C’est comme ça que j’ai atteint l’âge vénérable de 38 ans.

Je fuis pas “comme une lâche” mais “comme une survivante”.

J’ai déjà fui comme une lâche, mais pas si souvent que ça. Récemment, j’ai fui devant la parente 1 d’une copine du petit qui me demandait de lui faire une coloration à la maison pour faire fuir ses poux. Elle dépassait mes compétences de coloriste mais surtout je veux plus me lancer là dedans, clairement : elle en est sans doute au stade des x signalements à l’ASE vu l’état des petites, et j’ai pu l’énergie de prendre soin de deux enfants supplémentaires. Je suis lâche1.

J’en ai marre de me battre face à des moulins à vent.
Je suis fatiguée.

🐳🐳🐳

J’en ai marre de revoir les mêmes situations se répéter à l’infini. Aider une meuf à quitter son mec pour la voir se remettre avec un type du même acabit directement après.
C’est certainement pas de sa faute, non. Et elle ne perçoit pas le danger là où tu tiltes immédiatement. Et elle ne t’écoute pas : elle est amoureuse. Je la comprends.

Et j’aimerais tellement, je te jure, j’aimerais tellement que ça se passe bien, qu’elle vive sa happy end dans la joie et les fleurs.

En attendant, je veille, j’attends le moment où ça va déconner, parce que je serai là, évidemment, prête à refaire le même chemin de croix des 12 étapes du deuil de sa relation toxique2.

Je serai là dans 3 mois, 6 mois, 1 an, 2 ans, 7 ans, à SAVOIR.
On va dire que je commence à avoir du flair pour les mecs violents.
Chaque petit élément rapporté sonne comme une alerte en moi. Trop possessifs. Des propos bizarres, qui ne cadrent pas avec sa personnalité, les premières excuses quand il “va trop loin”, les excuses suivantes, celles d’après, “mais il est si gentil”, le déni. Même être trop sympa au début m’alerte.

Et s’il n’y en avait qu’une dans ma vie…

Chuis fatiguée.

🌳🌳🌳

Puis t’as la vie aussi.
La mort.
La mort beaucoup trop jeune. On meurt pas à 40 ans. C’est pas possible. Ça n’existe pas.
Même en Sierra Leone on peut espérer vivre jusqu’à 50,1 ans. C’est quoi cette arnaque ??!
Ouais t’as pas de réponse, moi non plus. J’ai juste de la colère et de la tristesse, là.

Et un cœur qui sert à que dalle ♥

☔☔☔

Je vais me refaire un café et passer à autre chose 2 mn. Je reviens. J’espère que ça ira mieux.

Cette année aussi j’ai abandonné mon père.
La fuite ultime. Libérée de l’obligation alimentaire par la Juge aux Affaires Familiales. Il mourra sans moi. Et si je renonce à l’héritage, il ne persistera pas à travers moi.

Je pensais qu’avec la décision de la Juge je serais libérée. Je le suis, quelque part, mais c’est pas une liberté savoureuse. C’est une liberté arrachée. Un petit bout de moi que je voulais récupérer pour ne pas le laisser à celui qui m’a engendrée.
Je veux tout récupérer, comme une vieille égoïste, pour qu’il se sente encore plus seul. La procédure et le jugement ont dû assassiner les dernières parcelles de santé mentale qui lui restaient, c’est ce que je me dis pour me rassurer.

Ça ne me rassure pas.

Et j’ai aussi donné, toute ma vie, pour l’aider dès que j’en ai eu la possibilité. Je l’écoutais monologuer des heures sur l’injustice de la vie, sur ma mère, sur sa première femme, sur sa troisième compagne, sur sa mère (Tu vois le pattern ? Lui non plus), sur “les autres”. Je l’écoutais dérouler ses plans de suicide, et je chialais, moi, à 17 ans, quand mon père me disait, à 700 km de distance “Je ne serai peut-être plus là demain” et débranchait le téléphone.

Quand un appel provient de son département de résidence, le fait même de voir l’indicatif me fait tomber immédiatement dans l’angoisse et la panique totales.

C’est le premier homme que j’ai essayé de réparer avec mon amour. On peut dire, aujourd’hui, que ça n’a pas été très probant.

“Daddy issues”
Si tu savais, mon pote.

Mais on peut pas réparer ses parents. Ça ne marche pas comme ça.

🦆🦆🦆

En 2020 j’ai aussi compris que je souffrais du travail et que je ne pouvais pas continuer comme ça.
J’ai des compétences et un CV qui font que je retrouve vraiment très facilement du boulot, c’est encore un privilège incroyable. Mais est-ce que je veux continuer à travailler pour ces gens-là ?
Pas sûre.

Cela dit j’ai eu une idée de troll.
On a rejeté une de mes candidatures parce que je n’avais pas une présence suffisante sur Linkedin. Moi je veux bien poster sur Linkedin mon idée du monde du travail, je suis juste pas sûre que ça joue en ma faveur pour trouver un job…
Mais franchement, je le ferai. J’ai pas mal écrit sur le travail en plus…qu’est-ce que j’ai à perdre ?

J’ai des compétences intéressantes, un boulot que j’aime réaliser, mais je veux plus de la start-up nation, pitié. J’en peux plus de leur “agilité” à la con. De tous ces éléments de langage disruptifs qui ne servent qu’à s’auto-congratuler d’avoir bien appris le lexique et à regarder de haut ceuxlles qu’ont pas les codes.

De ces réunions qui durent des journées entières pour dire rien qui n’aurait pu être dit par mail.
De ces chefs qui n’entravent que dalle à mon métier, qui me posent sans cesse la même question con “on peut le faire ?”. Mec, on est dans le monde de l’informatique, à quelques très rares exceptions on peut TOUT FAIRE, alors précise ta question.

“Est-ce qu’on peut le faire sans se faire choper par le RGPD ?” serait plus honnête.

Je suis fatiguée.

🦄🦄🦄

J’écris pas assez et pas assez bien pour oser même penser à espérer vivre de ça (ça n’a jamais été autre chose qu’une blague sur mon futur Goncourt mais en vrai je sais que je n’en vivrai jamais, les vraies auteurices n’en vivent pas, alors moi…).

Donc quand je serai un peu retapée psychologiquement, je vais remettre mon CV en ligne, on va m’appeler pour des postes chiants, loin, pas-si-bien-payés et surtout qui ne comprennent jamais ce que signifie embaucher une personne en situation de handicap. Non, ça ne signifie pas “une marche de plus pour arriver aux 6% de malades chez nous”, ça signifie des aménagements. Mais en général, crois-en mon expérience, ça s’arrête aux 6% dans leur tête.

J’ai déjà été virée parce que j’ai demandé un siège plus confortable. Prétextes ont été pris, bien sûr, Un jour, un commercial m’a appelé pour une recherche chiante, je lui ai dit en plaisantant “oh oui tu me déranges ohlàlà je regardais des photos de chats”.
“Tu regardes des sites perso au travail et tu réponds mal aux commerciaux”. Le mec m’avait balancé, même s’il a eu sa réponse, évidemment, et qu’il a ri avec moi.

Insomnie
Dépression
Pleurs
Anxiété
Crise existentielle
Solitude
“Je suis juste fatiguée”

🐡🐡🐡

J’adorerais mettre mes compétences au profit du militantisme. Je l’ai fait régulièrement, je le fais encore quand j’arrive à sortir la tête de mon marasme. Mais ça paye pas. Et j’ai beau aimer bosser pour l’amour du travail bien fait, on a encore 25 ans de crédit sur la gueule.

Plus je prends de l’âge, de la compétence et de l’assurance, plus je sais que j’ai envie de bosser pour quelque chose de signifiant, de juste, qui me fera vibrer dedans moi3.

Parce que si tu me fais confiance, si tu me laisse la latitude de réfléchir, de créer sans vérifier toutes les 2 mn que je travaille réellement, je peux faire des trucs vraiment bons. Mais des fois, j’ai besoin d’une aprèm de “rien” pour retrouver le fil de la créativité. J’ai beau bosser comme un âne dès que le fil est retrouvé et que tout prend sa cohérence, on me demandera ce que j’ai foutu le mercredi 24 février entre 14h et 18h.
J’ai beau parfois trouver la solution à 3h du matin, me redressant dans le lit en me disant “MAIS OUI” pour ensuite prendre frénétiquement des notes, j’étais pas en ligne le 24 février à 15h10.

Je peux pas créer sous contrainte, et dans mon boulot (analyste fonctionnelle, support technique, expressionniste de besoins et traductrice langage geek/commercial, soft skills +1000) j’ai besoin d’avoir la possibilité de tout arrêter 2 mn, de faire le vide en moi avant de trouver LA solution. On sous estime beaucoup l’aspect créatif dans mes métiers alors que c’est un talent hyper important. On te demande de penser “outside the box” mais quand tu le fais pas dans les règles…ouch.

🐡🐡🐡

J’ai plein de choses à apporter mais personne à qui les apporter. Enfin si, mais la variable “gagner de la thune” est malheureusement importante. Vitale.
Si encore je pouvais aller au boulot tous les jours.
Mais non. Des fois je peux pas bouger. Des fois mon injection d’anti-TNF me laisse en état semi-comateux durant des jours, en plus des nausées. Des fois, un de mes genoux dit merde. Des fois c’est le dos. En cas de gros stress, la névralgie cervico-brachiale revient.

Trop de pression sur ma gueule, l’esprit ne cède pas, le physique m’oblige à m’arrêter.

Alors t’es la meuf “jamais là” (alors que heu…si) parce qu’un jour t’étais pas là. On fait des blagues quand tu reviens après 1 semaine d’arrêt. On fait des vannes quand t’es pas là en disant que t’as déjà des aménagements horaires mais ça lui suffit pas, franchement elle abuse, elle exagère sûrement pour se prendre des vacances au frais de la princesse. On dit “Qui ça ?” quand une autre collègue parle de moi.

“Ça va mieux ?
– Heu…tu te souviens que je suis malade chronique ?
– Et ?
– Ben ça va mieux mais heu…je serai jamais guérie hein.
– Ah. 🙄”

Moi, avec ma canne :
“Tu t’es blessée ?
– Pas vraiment, j’ai un épanchement au genou, ça arrive.
– Oh zut”.

Trois mois après, même personne :
“Tu t’es blessée ?”

Pis t’es la rabat joie qui vient pas aux séminaires au ski.
8h+8h de car, déjà. Moi, spondylarthropathe, je tiens pas 2h assise sans douleur. Puis…du ski ? Le meilleur moyen de me blesser, oui.

Je ne sais pas à quel moment ces gens se sont dit que ce serait une bonne idée. Mais en réalité je sais que ma variable a été juste zappée parce que c’était trop chiant pour eux de prévoir un truc accessible aux personnes en situation de handicap. On s’est dit elle a qu’à pas venir, et elle est pas venue, problème réglé.

Niée dans ses capacités, considérée comme débile d’office car “handicapée”, non prise en compte dans ses difficultés incompréhensibles, gardée pour les 6%, mise petit à petit au placard, faute de lui donner les informations.
Cela fait un peu plus d’un an que je ne reçois plus de mail. On m’a exclue petit à petit, de tout. Parce que “Comme parfois tu es absente, on ne peut pas se permettre de te confier ce projet…”
Qu’est-ce que tu veux répondre à ça ?

Friendship is magic !

♿♿♿

La fatigue, le désespoir aussi, un peu.
Tellement à donner.

J’ai juste envie de me réaliser, enfin, de m’affranchir de tout ça, d’y aller à fond, de me consacrer à ce que j’aime, à ceuxlles que j’aime aussi. Le pire c’est que j’ai beau être dans un état d’épuisement avancé, je ne regrette rien, et je continuerai à donner, je le sais déjà.
Le vide, la lassitude et tout cet amour en face.

Alors je vais me reposer un peu, je vais fermer quelques écoutilles, serrer les dents, continuer à avancer en sachant que je ne suis pas seule sur mon radeau.
Et ça va être dur, d’autant plus dur dans un monde en crise.

  1. Elle s’est fait retirer ses deux filles en fin d’année scolaire et a disparu de la circulation. Manifestement et comme je le pensais, il y avait de la violence physique et un père heu…voilà []
  2. edit 2022 : j’étais pas prête en fait []
  3. Du coup on est en mai 2022 et j’écris toujours presque chaque matin, je gagne rien mais je m’en fous []